L’immobilier est en pleine mutation sur toute sa chaîne de valeur. De gré ou de force. Au-delà de la crise conjoncturelle que traverse le secteur – et qui est violente –, on voit que les modèles économiques qui font flores depuis plusieurs décennies sont challengés. Challengés par la transition climatique qui oblige à décarboner ses actifs. Challengés par l’évolution des usages qui réinterrogent la valeur ajoutée du bureau, du commerce, de l’entrepôt. Challengés par le big bang des valeurs qui se fracturent entre les actifs « prime » que l’on s’arrache et les autres que l’on délaisse.
Dernier exemple en date – mais assez symbolique des enjeux qui attendent les acteurs de toute l’industrie immobilière –, le quartier de La Défense. La Chambre régionale Île-de-France de la Cour des comptes s’est inquiétée du modèle économique de l’établissement public d’aménagement tout en soulignant la gestion interne fiable et efficace. Un modèle dont les recettes s’essoufflent faute de nouvelles constructions et qu’elle appelle à renouveler.
Rien de nouveau sous les pavés. De nombreux rapports, à commencer par ceux des acteurs privés impliqués dans le territoire, ont pointé la nécessité de réinventer un modèle basé depuis plus d’un demi-siècle sur la vente de droits à construire à l’aube d’un cycle qui sera celui de la réhabilitation et de la transformation.
Le problème, c’est que la Chambre régionale des comptes avance des solutions éculées pour équilibrer les finances de l’établissement public dans les prochaines années. D’un côté, augmenter la contribution des collectivités locales. Mais on voit mal comment faire passer la pilule aux maires… surtout à quelques mois des élections municipales. De l’autre, ajouter une redevance aux entreprises qui… n’en manquent pas.
Autant dire qu’il ne se passera rien à court terme. Ce qui n’empêche pas de penser dès à présent à de nouveaux modes de financement. Pas pour sauver un établissement d’aménagement, mais pour éviter qu’un quartier périclite.
L’une des voies sera d’investir pas uniquement dans les infrastructures urbaines, mais aussi dans les actifs immobiliers en poussant les aménageurs publics à monter dans le capital des opérations. C’est ce qu’a initié Grand Paris Aménagement en s’ouvrant à la copromotion.
Le cran d’après sera de passer à la codétention. Et de l’accélérer auprès des acteurs publics locaux. On évitera ainsi le procès de la captation de valeur par une seule partie prenante et on responsabilisera quelques édiles qui se sont souvent contentés de percevoir leurs dîmes locales.
La Défense, vitrine des quartiers d’affaires, est ainsi un laboratoire à ciel ouvert des enjeux qui attendent dès à présent les acteurs de la filière dans ce nouveau cycle. Ce qu’on attend, c’est un peu plus d’innovation, un peu moins de providence.