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21 avril 2025 | 19:00 CET

Un marché de bureaux lillois touché mais pas coulé en 2025

Business Immo revient sur les principaux deals à l’investissement et locatifs sur le marché de bureaux lillois en 2024 et 2025
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L'Espace Carnot (CoStar)

Comme beaucoup d’autres marchés de bureaux en région, celui de la métropole lilloise subit de plein fouet l’attentisme des investisseurs en ce début d’année. Absolument aucune transaction n’a été réalisée sur le 1er trimestre 2025. Une tendance qui pourrait cependant quelque peu s’inverser dans les prochains mois.

Pourquoi ? D’abord parce que le marché de bureaux lillois sort d’un exercice 2024 honorable sur le front de l’investissement. Environ 198 M€ ont été investis l’année dernière, ce qui représente certes un résultat inférieur de 46 % à la moyenne des cinq dernières années, mais une hausse sur un an. « Le marché de bureaux lillois a connu un rebond au niveau de l’investissement en 2024. Environ 198 M€ ont été investis, ce qui représente une hausse de 20 % sur un an dans un marché encore chahuté au niveau national. Nous avons constaté une part importante des volumes supérieurs à 10 M€, avec huit transactions significatives réalisées cette année entre 10 et 30 M€ sur des dossiers core+ », explique Maxime Debieuvre, directeur Investissement Hauts-de-France chez JLL.

Un marché porté par les « nouvelles SCPI » en 2024

L'immeuble Grand Angle (CoStar)
L'immeuble Grand Angle (CoStar)

Parmi les principales transactions réalisées sur ce marché en 2024, on retrouve notamment la cession de l’Espace Carnot (12 000 m²) par Crédit agricole immobilier auprès de la SCPI Vendôme Régions, gérée par Norma Capital, pour un montant de 32 M€. Mais aussi l’acquisition en sale & leaseback par KanAm Grund Group du siège social d’Agapes (9 000 m²), à Lezennes, pour 24 M€. Ou encore la cession par KanAm Grund Group auprès de la SCPI Vendôme Régions du Panorama (7 731 m²) à Saint-André-lez-Lille, pour 23 M€.

Ces opérations démontrent la vitalité du marché lillois en 2024. « L’année dernière, le marché de bureaux lillois a été porté principalement par les “nouvelles SCPI” qui, bénéficiant d’une collecte satisfaisante, ont profité de rendements attractifs en région et d’opportunités disponibles sur des emplacements centraux », relève le directeur Investissement Hauts-de-France chez JLL. « Le secteur de Lille représente 60 % des volumes investis avec des transactions significatives comme Le Roisin, l’Espace Carnot ou encore Eurocentre et Grand Angle, à Euralille. Concernant la périphérie, les deals ont porté majoritairement sur des immeubles récents avec des engagements longs et des taux proches de 6,50 %. »

En revanche, il n’y a eu qu’une seule Vefa en 2024 : celle de Midi 2i, agissant pour le compte de la foncière de la Banque populaire du Nord, sur Link’In au sein du parc du Pont-Royal, à Lambersart – un immeuble de bureaux de 4 400 m² développé en copromotion par Nacarat et Carré. Dans ce contexte, Maxime Debieuvre indique que « le marché du neuf est quasiment à l’arrêt faute d’opportunités disponibles sur le marché ». Et que cette unique transaction « représente 10 % des volumes investis cette année », alors que les Vefa représentaient « près de 40 % avant 2022 ».

« Côté vendeurs, certaines SCPI ou acteurs étrangers se sont désengagés d’actifs qu’ils détenaient depuis un certain temps et qu’ils considéraient comme liquides dans le marché actuel par leur emplacement ou leur état locatif consolidé. Après la forte hausse des taux en 2022/2023, Le marché s’est stabilisé en 2024 avec des nouveaux consensus de prix acceptés par les vendeurs/acquéreurs », poursuit le directeur Investissement Hauts-de-France chez JLL. Parmi les vendeurs en 2024, on retrouve notamment l’investisseur allemand KanAm Grund Group, mais aussi La Française REM, Crédit agricole immobilier, Axa IM Alts, BNP Paribas REIM ou encore Allianz Immovalor.

Vers une légère compression des taux ?

Quid désormais de l’investissement en 2025 sur le marché de bureaux lillois ? « En 2025, on observe une sélectivité accrue de la part des investisseurs et un souhait de diversification », explique le directeur Investissement Hauts-de-France chez JLL. « Cette prudence s’explique en partie par une exposition déjà importante en bureaux dans certaines localisations. Avec un 1er trimestre au ralenti, on sait d’ores et déjà qu’il sera difficile de dépasser les 200 M€ investis en 2025. Néanmoins, plusieurs marketings en cours se concrétiseront au 2d semestre et viendront alimenter les chiffres de l’investissement cette année. »

« Aujourd’hui, le rendement prime lillois se situe autour de 6 % », poursuit Maxime Debieuvre. « Les dernières annonces de la Banque centrale européenne (BCE) et la rareté des opportunités depuis le début de l’année, notamment due à l’absence de Vefa, pourraient engendrer une concurrence accrue entre les investisseurs actifs en quête de déployer leur capital d’ici fin 2025. On peut ainsi s’attendre à une légère compression des taux sur les prochains trimestres, signe d’une compétition plus intense sur les meilleurs actifs et emplacements. »

Reprise du marché locatif tertiaire lillois

Concernant le marché locatif tertiaire lillois, il « montre des signes encourageants de reprise au 1er trimestre 2025 », selon Charlotte Ghesquière-Ballu, directrice agence bureaux chez JLL Lille. Pour rappel, la demande placée a atteint 151 946 m² l’année dernière, soit une baisse de 22 % sur un an, mais un recul limité de 12 % hors comptes propres par rapport à 2023. Au 1er trimestre 2025, ce marché présente un volume global de 45 119 m² placés, dont 38 370 m² hors comptes propres, pour 61 signatures (57 hors comptes propres).

L’activité hors comptes propres affiche une hausse de 13 % par rapport au 1er trimestre 2024 et se rapproche de la moyenne quinquennale, tandis que le nombre de signatures demeure inférieur de 34 % à la moyenne, d’après JLL. « La hausse du volume placé est un indicateur positif, mais le nombre de transactions en baisse par rapport à la moyenne quinquennale reflète les difficultés auxquelles font toujours face les entreprises dans un contexte volatil », analyse Charlotte Ghesquière-Ballu.

Elle explique par ailleurs cette hausse du volume placé par « le retour des transactions en comptes propres ». « À l’exception de l’année dernière, ces ventes à utilisateurs représentent une part importante du marché lillois », indique-t-elle. Elles représentent en effet plus de 60 % de la demande placée totale à travers 17 signatures. Ce trimestre, l’Ircem, groupe de protection social, a notamment acquis l’immeuble de bureaux Imagine (10 700 m²) au sein du parc Les Prés Business Pôle, à Villeneuve-d’Ascq.

Villeneuve-d’Ascq et les Grands Boulevards à la mode

Villeneuve-d’Ascq fait partie avec les Grands Boulevards, Lille et Euralille, des secteurs toujours principalement ciblés par les entreprises dans la métropole. « Maintenant, à Lille et Euralille, il y a un manque d’offre neuve et adaptée à leurs besoins », tempère cependant Charlotte Ghesquière-Ballu. « Elles préfèrent donc louer ou acheter leurs bureaux à Villeneuve-d’Ascq qui est situé à une dizaine de minutes en métro d’Euralille. Elles peuvent y trouver des immeubles neufs à 190 €/m², alors qu’à Euralille le loyer prime est plutôt entre 240-250 €/m². »

« Les Grands Boulevards affichent quant à eux un loyer à 180 €/m². Ils attirent également beaucoup d’entreprises, notamment des sièges sociaux. Je pense à Swiss Life ou la Banque populaire qui y ont signé des transactions de plus de 10 000 m². C’est un secteur où il y a une appétence pour les ventes à utilisateurs », ajoute la directrice agence bureaux chez JLL Lille, dont les propos se vérifient en chiffres : les secteurs des Grands Boulevards et de Villeneuve-d’Ascq se démarquent en effet avec respectivement environ 15 650 m² et 18 500 m² placés. À l’inverse, Lille Centre et Euralille continuent de rencontrer des difficultés, avec des volumes en baisse de 29 et 47 % sur un an.

Restructurations et hausse des loyers en vue

La tour de Lille (CoStar)
La tour de Lille (CoStar)

Sur ces secteurs justement, Charlotte Ghesquière-Ballu souligne « qu’il n’y a plus de foncier disponible ». « Sur Euralille et Lille, Il y a beaucoup d’immeubles anciens à restructurer comme la tour de Lille* ou la cité administrative**. Ils font partie de ces actifs qui nécessitent des capex afin d’être repositionnés et recommercialisés. Ces immeubles totalement obsolètes, qui ne répondent plus aux besoins des entreprises, permettront, s’ils sont repositionnés, de redynamiser le marché de bureaux de Lille et d’Euralille à l’avenir », anticipe-t-elle.

« Ces projets de restructuration s’accompagneront inévitablement d’une hausse des loyers. Le défi va être d’accoutumer les entreprises à ces niveaux de loyers. On sait déjà qu’à Euralille, le loyer prime dépassera les 250 €/m² dans les prochaines années, et qu’en périphérie il sera supérieur à 200 €/m² », ajoute la directrice agence bureaux chez JLL Lille.

« Les résultats du 1er trimestre démontrent la capacité de rebond du marché tertiaire lillois. La durabilité de cette reprise, fragile dans un contexte global perturbé, devra se confirmer dans les prochains mois », conclut Charlotte Ghesquière-Ballu. Après la pluie vient le beau temps sur le marché de bureaux lillois ?

VENTES INVESTISSEURS

Deals & DataActifSurfaceAcquéreur(s)Vendeur(s)Conseil(s)Montant
1l’Espace Carnot 12 000 m² SCPI Vendôme Régions, gérée par Norma Capital Crédit agricole immobilier JLL et Arthur Loyd32 M€
2Agapes 9 000 m²KanAm Grund GroupAgapes S.A.JLL24 M€
3Panorama7 731 m² SCPI Vendôme Régions, gérée par Norma Capital KanAm Grund Group JLL et BNP Paribas Real Estate23 M€ 
4Eurocentre7 489 m²SCPI Iroko ZenAxa IM AltsJLL et BNP Paribas Real Estate21,1 M€
5Grand Angle7 000 m² SCI Territoires Avenir, gérée par Arkéa REIM KanAm Grund GroupJLL, BNP Paribas Real Estate et CBRE21 M€ 
6Le Roisin4 800 m²Family office (Daniel D’Hondt et Philippe Depasse)SCPI Selectinvest 1, gérée par La Française REM Arthur Loyd et Arrow18 M€ 
7Link’In4 400 m² Midi 2i/Banque populaire du Nord Nacarat et Carré Arthur Loyd15 M€ 
8Euralliance4 800 m²Foncière de l’érableBNP Paribas REIM BNP Paribas Real Estate14,5 M€
9Le First 4 500 m² PolygoneAllianz Immovalor BNP Paribas Real Estate5,1 M€ 

VENTES UTILISATEURS

ActifSurface m²Acquéreur(s)Vendeur(s)
1Imagine 10 700 m² Ircem n.c.
2Attraction 10 200 m²Banque populaire du Nord Sogeprom-Projectim/Nhood 
8 300 m² Mobilis, family office de l’AFM 
3Pure8 121 m² Swiss Life AMBesix Red Real Estate Development 
4Les Terrasses5 881 m² Euro-Information, filiale technologique du Crédit mutuel SCI Allianz Value Pierre, gérée par Allianz Immovalor 
5Prisme5 295 m² Eiffage Énergie Eiffage
6Qualia4 621 m² CESIQuaero Capital 

LOCATIONS

ActifSurfacePropriétairePreneur(s)
1Upline 9 996 m² Lazard Group Decathlon 
2Empreinte5 324 m²CarréKeolis
3Emblem4 126 m² Ofi Invest Real Estate Octopus 
3 958 m²Nocibé 

Des immeubles anciens à restructurer

* Imaginée au début des années 1990 par l’architecte Christian de Portzamparc, la tour de Lille, surnommée « la botte de ski » en raison de sa forme, appartient à 50 % à la banque LCL et l’autre moitié à Amundi. Cette tour de bureaux, située boulevard de Turin, à Euralille, au pied de la gare, est sur le point de changer de main. En effet, Linkcity, promoteur et filiale de développement immobilier de Bouygues Construction, a signé une exclusivité ; la réitération est prévue d’ici l’année prochaine. Le promoteur prévoit de repenser cet actif à l’usage exclusivement tertiaire en y ajoutant de la mixité, notamment un hôtel 3 étoiles ou encore un restaurant panoramique au 19e et dernier étage. Mais Linkcity doit d’abord s’adosser à un investisseur pour réaliser ce projet, selon nos informations.

** Dans la même veine, un autre immeuble emblématique de la métropole lilloise a été mis en vente en 2023, mais cette fois-ci par l’État : l’ancienne cité administrative située 175 rue Gustave-Delory. Un bâtiment comprenant 31 180 m² de surface de plancher et nécessitant des capex. Dans ce dossier, l’une des difficultés pour les potentiels acquéreurs était que l’État attendait des offres fermes et sans condition suspensive. De quoi refroidir les ardeurs des investisseurs ? Pas du tout. Selon nos informations, il y a bien eu plusieurs offres déposées sur la table de l’État, mais ce dernier a estimé qu’elles n’étaient pas satisfaisantes tant au niveau financier, qu’au niveau de la programmation – il souhaitait notamment que le projet comprenne des logements sociaux. L’appel à candidatures a donc été jugé infructueux. Un nouvel appel d’offres n’est cependant pas à exclure post-élections municipales, d’après nos informations.