Juste une illusion ou une inflexion ? La salve des études de marché trimestrielles donne une lecture un peu plus précise de l’état de la situation, pour refaire le sketch de Raymond Devos.
Sur le front européen, les analystes évoquent sans ambages l’entrée dans un nouveau cycle immobilier. Comment le mesure-t-on ? Par une reprise des transactions, le volume d’investissement s’inscrivant en hausse pour le 3e trimestre consécutif en Europe. Par un atterrissage des valeurs qui redonne une prime de risque pour l’immobilier. Le repricing, depuis la remontée des taux d’intérêt, n’aura épargné aucune catégorie d’actifs. Il aura même été violent pour certaines d’entre elles, notamment le bureau secondaire. Mais il touche à sa fin pour la plupart des segments et s’inverse (même si cela est de manière marginale) sur certains d’entre eux.
La France fait exception. Les volumes d’engagements en immobilier d’entreprise sont encore en berne au 3e trimestre et accusent un repli de 11% depuis le début de l’année, à quelque 10 Mds€. La dissolution de l’Assemblée nationale a cassé les pattes des investisseurs. L’incompréhensible dérapage du déficit budgétaire a dégradé notre image auprès des marchés financiers, les taux français à dix ans ayant dépassé ceux des Portugais et des Espagnols, se rapprochant maintenant des Italiens. Pas sûr que le concours Lépine des nouveaux impôts et autres prélèvements obligatoires suffira à inverser la courbe.
Nonobstant ces escarmouches parlementaires franco-françaises, le véritable juge de paix pour les investisseurs reste l’évolution des taux directeurs. La baisse est clairement enclenchée, signe que la bataille contre l’inflation est considérée comme gagnée par les banques centrales. Tout un chacun a compris que l’on ne retrouverait pas les niveaux d’avant 2022, plus certainement ceux d’avant 2008. Les projections tablent sur un taux plancher de la BCE à 2,25 % à la fin du 1er trimestre 2025.
Dans ce contexte, l’immobilier en Europe est appelé à sortir la tête de l’eau. Dans ses projections à cinq ans, Praemia Reim anticipe des performances globales annuelles entre 5 et 7 % pour la plupart des catégories d’actifs, à l’exception notable des bureaux dont le total return est ramené entre 4 et 5,5 %, surtout en raison d’un rendement en capital qui sera nul. Cela reste un placement de bon père de famille.
L’autre juge de paix sera quand même la conjoncture économique. Car, là aussi, un nouveau cycle s’annonce, moins porteur pour les pays occidentaux. Un patron de foncière disait très justement : « Mon risque, c’est la santé de mes locataires. »