Les relations entre l’Europe et les États-Unis deviennent quelque peu agitées depuis le 20 janvier dernier. C’est dans ce contexte de tensions commerciales et géopolitiques que le conseil Newmark a publié il y a une quinzaine de jours une étude très instructive sur les investissements immobiliers nord-américains, en particulier ceux qui sont fléchés vers l’Europe et la France.
Mais d’abord, regardons le poids des Américains et des Canadiens dans le secteur. Ce sont les premiers acteurs de l’investissement immobilier dans le monde. Les chiffres sont assez éloquents. L’an passé, ils ont représenté 60 % des 769 Mds€ investis dans le monde. Ils devancent les Européens (19 %) et les Asiatiques (16 %).
Si l’essentiel des capitaux est réservé à leur marché domestique, le plus profond avec 430 Mds€ d’investissement, un certain nombre se déversent en Europe : 36 Mds€ en 2024. Ce qui en fait leur première destination à l’étranger. Quand bien même l’Europe a souffert d’un ralentissement économique, d’incertitudes politiques et d’un conflit armé entre la Russie et l’Ukraine.
Quid de la France ? Elle capte encore plus de 3 Mds€ d’investissement de la part des acteurs nord-américains. Depuis 15 ans, plus de 70 Mds€ de capitaux venus d’outre-Atlantique se sont déversés sur l’Hexagone, dont 50 à Paris. Ce qui en fait l’une des trois grandes métropoles à attirer les investisseurs américains, derrière New York et Londres.
Il faut reconnaître que l’histoire immobilière entre les Nord-Américains et la France raconte un peu les cycles qu’aura connus notre secteur, jalonnés de succès et de déboires aussi.
Les années 1990 verront l’arrivée de fonds, qualifiés à l’époque de « vautours ». Lesquels, à coup de rachats de créances douteuses et d’immeubles plantés, auront eu le mérite de nettoyer un secteur en perdition.
Les années 2000 seront celles de la financiarisation de l’immobilier, marquée notamment par l’instauration du statut des sociétés d’investissement immobilier cotées – le statut Siic, directement inspiré des REITs américains.
Depuis 15 ans, même après le choc Lehman Brothers, les Nord-Américians n’auront cessé d’investir en France, insistant sur la logistique depuis le Covid. Et de nouveaux acteurs continuent d’arriver sur le marché hexagonal : Clarion, Cadillac Fairview, Franklin Templeton, Realty Income, Realterm…
Alors, quand bien même les relations entre les États-Unis et l’Europe se dégradent, on imagine mal les Américains se détourner de notre continent. D’autant que le dollar reste fort comparé à l’euro. Que le marché immobilier européen est profond et multiple. Que les valeurs y ont corrigé.
Les quelques « happy few » parisiens qui déboisent sur l’Amérique de Trump ne sauront à eux seuls remettre en question une « love story » de plusieurs décennies. Après tout, dans les histoires d’amour, il y a toujours des hauts et des bas.