Tout le microcosme de l’immobilier et de la gestion de patrimoine attendait avec impatience les statistiques de l’Aspim et de l’IEIF de collecte des SCPI au 1er trimestre 2024. Un indicateur devenu le thermomètre de l’attractivité de l’investissement dans l’immobilier.
Pas de réelle surprise. La collecte est en berne, dans la lignée des 3e et 4e trimestres 2023, mais elle n’est pas tombée au point mort avec 1,1 Md€ encaissés sur les trois premiers mois. Le point noir, c’est qu’une partie de cet argent frais ne s’est pas déversé dans les immeubles, mais est venu rembourser ceux qui cherchent à partir. Sur le 1er trimestre, 326 M€ de rachats de parts ont été compensés par les nouvelles souscriptions. La montagne est encore haute à gravir puisque la valeur des parts en attente de retrait représente 2,4 Mds€ au 31 mars 2024. Seulement 2,7 % de la capitalisation totale des SCPI, observe-t-on à l’Aspim. Ou deux trimestres de collecte brute, si on prend un autre angle de vue.
L’autre point noir, c’est que le problème de liquidité pèse sur des SCPI qui ne collectent plus. Celles n’ayant pas de parts en attente représentent 83 % des souscriptions brutes du 1er trimestre. Il se forme une polarisation du marché de l’épargne immobilière entre des acteurs historiques collés par la gestion de leurs parts en attente et des néo-SCPI qui profitent d’une certaine virginité. Cette prime à la jeunesse n’est pas sans risque quand on regarde la granularité de leurs portefeuilles. Elle ne pourra durer éternellement si l’ensemble des gestionnaires de SCPI ne redressent pas la barre.
Pour stopper l’hémorragie, les SCPI devront agir sur trois leviers. D’abord, restaurer l’attractivité de l’investissement immobilier. Longtemps, les sociétés de gestion de portefeuille se sont gaussées d’offrir un rendement bien supérieur à tout autre placement sans risque. Avec la hausse des taux d’intérêt, elles se prennent un violent effet boomerang. Jean-Marc Peter, le directeur général de Sofidy, a raison de dénoncer le miroir aux alouettes des livrets, fonds obligataires ou autres « fonds euros boostés », mais l’investissement dans la pierre-papier devrait mettre en avant ses propres qualités plutôt que dénoncer les turpitudes de ses voisins. La première d’entre elles reste la capacité de distribution que les SCPI semblent conserver au 1er trimestre 2024.
Le deuxième levier pour restaurer la confiance sera de ne plus mélanger les torchons et les serviettes, c’est-à-dire les institutionnels et les particuliers. Le « SCPI run » vient avant tout des zinzins qui ont assuré leur liquidité sur le dos des autres, entraînant une crise de confiance de leurs associés, si minoritaires soient-ils.
Enfin, une fois que les indicateurs macroéconomiques et les conditions de marché reviendront à la normale, les gérants devront résister à la tentation du court terme. L’afflux de liquidités ces dernières années a poussé de nombreux acteurs à l’acquisition, l’effet moutonnier des investisseurs accentuant comme toujours une certaine distorsion dans l’appréciation des valeurs. Seuls les contracycliques s’en sortent. Mais ils ne peuvent être qu’une minorité.
La crise de confiance que traversent les SCPI vaut pour tout l’immobilier. La sortie se fera certainement par un ajustement des taux, mais aussi et surtout par la pertinence du sous-jacent (l’immeuble) et la qualité des équipes pour en tirer toute l’efficience. Autant être franc, tout le monde ne part pas à armes égales.